4 « À dada sur mon bidet »: ce jeu d'origine paysanne trouve encore toute sa place dans nos vies urbaines car ses ressorts ludiques sont universels. 5 Que ce soit « la petite bête qui monte », le « à dada » ou d'autres « petits contes en jeu », ce sont des jeux qui se jouent à deux, entre un enfant jeune et un adulte, avec une constante propre aux jeux des tout-petits: ils sont d'autant plus amusants que l'adulte appartient à la sphère de connaissance du bébé. 6 Le jeu à deux, c'est déjà un jeu à plusieurs dans lequel le plaisir d'être ensemble se double d'une expérience particulière de la dualité: elle est physiquement éprouvée car le jeu se joue en face-à-face, avec échanges de regards, sans confusion possible entre les rôles. Le jeu prend naissance à l'entre-deux des partenaires quand le comportement de l'un est la source du jeu pour l'autre et réciproquement. 7 « La petite bête qui monte » est un jeu pour le plaisir sensoriel, tactile et kinesthésique qui augmente et se décuple au fur et à mesure qu'il se répète, jusqu'à en perdre le souffle.
La Petite Bête Qui Monte Le
Le « à dada », est plus un jeu moteur qui mobilise le corps entier, bras, jambes, tête, tronc, mains. 8 Jeux d'exercices encore car ils mettent en pratique la relation de cause à effet. Pas de surprise, la cause est bien identifiée, c'est l'adulte. Enfin, les répétitions de la séquence constituent bien le premier ressort ludique; elles éloignent la sensation d'inquiétude de ce qui va arriver pour laisser la place au plaisir de ce qui advient comme cela était prévu. 9 Dans l'analyse de ces jeux, il est possible de repérer différentes phases qui se succèdent dans une construction très classique et sans surprise. 10 La première phase de reconnaissance mutuelle des joueurs permet de s'accorder sur ce à quoi l'on va jouer. L'un des deux partenaires invite son comparse avec un mot, un geste, une attitude. C'est l'accord métaludique [1] nécessaire à tous les jeux à plusieurs qui pose implicitement les conditions du jeu comme activité libre, gratuite et surtout fictive. 11 Puis le début du jeu, quand la petite bête se pose sur le ventre.
12 Puis la phase principale où elle grimpe sur le thorax. 13 Et la phase finale, le dénouement, où elle se glisse dans le cou. 14 Ce déroulement très classique avec un début et une fin met en évidence l'utilisation d'un second ressort ludique: le temps, incarné par l'historiette et son scénario (d'où la notion de « conte en jeu »). 15 Mis en pratique dans ce jeu sensoriel, le temps permet au bébé, petit à petit, de faire l'expérience du corps non morcelé puisque la petite bête grimpe doucement sur tout le corps, du ventre jusqu'au cou. C'est le plaisir physique de se sentir soi-même, entier. Avec l'historiette, le temps avance et autorise la prévision de ce qui va arriver; avec un avant et un après… c'est le plaisir de l'anticipation. 16 Quand la petite bête est près du but, le temps se compresse et fait battre le cœur plus vite. Le temps est suspendu quand elle s'arrête au milieu du chemin, juste sur la poitrine où le souffle devient court. C'est le plaisir de l'attente où flotte une légère inquiétude comme si ce que l'on sait de la suite des événements pouvait ne pas toujours être vrai.