Le texte n'aurait pas une telle puissance. On l'aurait goûté à sa juste saveur, tel un simple malentendu: superficiellement. On y aurait vu une dispute partant de rien, des quiproquos peu conséquents, avec estocades bien frappées, entre deux amis d'humeur à déverser de petites rancunes. Sans plus. Or la pièce cogne beaucoup plus fort. Nathalie Sarraute, figure majeure du Nouveau Roman, s'attache à déceler les mouvements les plus infimes du moi, les émotions, les sentiments les plus fugaces qui échappent à la conscience même et provoquent de véritables drame intimes. Pour un oui ou pour un non au Théâtre La Manufacture des Abbesses - Paris - Archive 03.03.2022. Derrière les mots si merveilleusement choisis, se cache, dans les replis des souvenirs exprimés, l'épouvantable incompréhension de l'autre. Ou deux facettes de soi douloureusement contraires. © Franck Vallet
L'explication tourne au cauchemar, car elle se sédimente progressivement de ressentis violents de part et d'autre, cachés derrière des mots policés sans gravité apparente. Ceux qui pensaient s'aimer ont, depuis longtemps en réalité, basculé dans « deux camps ennemis », sans possibilité de « rémission », ni de « conciliation ».